Pour une nouvelle approche de la gouvernance des Ecoles de Commerce 20/04/2007 De multiples articles, études, audits ont été écrits depuis 20 ans sur les questions agitant les Ecoles de Commerce, les derniers en date étant de M.Cornu de la CCIP, ou le N° spécial de Sociétal de Gérard Moatti et Laurence Ville « L’enseignement supérieur dans la compétition mondiale » du 2eme Trimestre 2004, sans que le dossier n’ait avancé d’un pouce. La double tutelle ministérielle, Ministère de l’Education et Ministère de l’Industrie (tutelle des CCI) est en fait paralysante et oppose deux logiques différentes : une logique administrative nationale et réglementaire du monopole des diplômes et une logique mixte « client » (celle des entreprises) et de contrôle budgétaire de l’usage de la parafiscalité collectée par les CCI, l’IATP (Impôt additionnel � la taxe professionnelle), la Taxe d’apprentissage. La première question � trancher est celle de l’unicité de la tutelle, car l’ambiguïté créée de l’inhibition. Il faut clarifier enfin le concept de finalité des Ecoles de Commerce, en anglais « Business Schools », Ecole des Affaires, au sens de l’activité économique et des entreprises. Dans la réalité, ce sont directement ou indirectement les entreprises qui financent le système, par la fiscalité (IATP), par l’apprentissage et la taxe d’apprentissage, par les recrutements et les rémunérations associées, par les dépenses de formation continue, par les Chaires et autres partenariats signés avec ces écoles. Dans les faits, au niveau mondial, ce sont les institutions qui ont les meilleurs liens avec les plus grandes entreprises qui sont les plus reconnues, développent le plus la recherche, sont les plus sélectives, ont les corps professoraux les plus importants et appréciés. Cette tutelle chef de file, s’il en faut une, revient donc de plein droit, par la légitimité des règles de marché au Ministère de l’Industrie, c'est-� -dire au Ministère des Finances. Le formalisme dépassé du contrôle administratif du Ministère de l’Education n’est désormais plus compétitif, en tout état de cause pour les meilleures institutions, vis-� -vis des enjeux internationaux et des nouvelles procédures internationales d’accréditation (Equis, AACSB, AMBA). La tutelle même des CCI surtout quand elle est pensée au sens étroit du terme : Ecoles simples services de CCI, voire sans conseil d’administration, est aujourd’hui dépassée. Le récent article de Sociétal (N°44, Basso, Dornier,Mounier, 2éme trimestre 2004) a le grand mérite de mettre nombre de points sur nombre de i. La liste des 7 paradoxes sonne comme autant de péchés capitaux dont il faudrait un jour s’affranchir (l’origine des dirigeants français,la pédagogie, les classements, la relation aux anciens élèves, la relation aux entreprises, les enseignants, la gouvernance) Il est donc désormais urgent de doter les meilleures institutions d’un statut différent, d’une gouvernance différente et de modalités de financement nouvelles. La Taxe d’apprentissage, un des éléments fondamentaux de ce financement et qui au travers de son opacité critiquable et douteuse, créée cependant la nécessité pour les écoles de prendre langue avec les entreprise. Elle ne cesse d’être réaménagée, tant elle a été détournée, et sa fin proche, dans sa vocation de financement des Ecoles de Commerce, est sans cesse programmée pour l’année � venir. L’évolution de l’IATP va dans le même sens, puisqu’il est question de supprimer la taxe Professionnelle, il devient urgent de se poser la question : et après ? Certes une réforme des statuts, tutelle, gouvernance, organisation, recrutements (élèves et professeurs) et financement ne rapportera aucune voix de plus au courageux politique qui s’en emparera. Il ne fera au mieux que des mécontents. Mais considérons en premier cher une première réalité. Toutes les institutions n’appartiennent pas au même segment stratégique. Rapidement on peut identifier 5 grandes classes d’institutions 1. Les vraies internationales : plus de 150 professeurs, moins de 50% de nationaux, il en existe une quinzaine de par le monde : en Europe il y en a trois : Insead, IMD, LBS. 2. Les grandes nationales � forte ouvertures internationales : il en existe une soixantaine dans le monde, en France il y en a 5 ou 6. (Equis, AACSB et AMBA pratiquement obligatoires). 3. Les régiono-nationales, c’est le cas le plus fréquent pour les bonnes écoles de commerce en France 4. Les locales, pour la France, type EGC, niveau Bachelor (L Bologne) 5. Les micro-locales souvent institutions privées sans corps professoral permanent ( il y en a vraisemblablement plusieurs milliers au monde et plus de cent en France) Les franchissements de seuils sont longs et coûteux. A partir du niveau 2 le portefeuille d’activités présente des programmes de type MBA accrédités, une forte activité recherche, un programme doctoral, une activité de formation continue de haut niveau. Quelques pistes de réflexions, quelques propositions qui devraient d’abord concerner le financement et la gouvernance : • Un statut privé � TVA 0% ou minorée • Des investissements en recherche défiscalisés • Une fiscalité de la philanthropie appropriée • Des modalités de financement permettant : o Des prêts � taux 0% pour les écoles accréditées o Des frais de scolarité proche du coût réel o Des allègements fiscaux sur les rémunérations futures quelque soit le pays de travail pour permettre les remboursements d’emprunt • De vrais conseils d’administration avec des administrateurs représentant les actionnaires, et la participation des acteurs publiques financeurs, mais non exclusivement consulaires. Encore faut-il peu de courage collectif des meilleurs institutions, une certaine résistance aux pressions amicales, de bonnes entrées au Ministère des Finances, et d’une bonne lecture du contexte concurrentiel international des Business Schools. Les Ecoles n’ont pas su profiter de la présence � Matignon d’un de leurs anciens élèves. C’est bien regrettable car il n’est pas dit que l’opportunité se représentera sous peu. La réforme tarde, et les institutions souffrent, bientôt ce seront les élèves, puis les entreprises qui en pâtiront.