Résumé DRH Stratège Les Directeurs de Ressources Humaines n’ont pas toujours leur place dans les Comités de Direction. Triste mais réaliste constat, qui vient en contradiction des aphorismes sans cesse répétés sur « l’importance des hommes et des femmes dans l’entreprise ». Une des raisons est sans doute que les DRH se sont souvent cantonnés à la dimension administrative, technique et gestionnaire d’effectifs de leur mission sans prendre en compte la dimension stratégique propre à l’entreprise. L’ouvrage d’Yves réale et Bruno Dufour a pour ambition de les guider dans ce chemin d’influence et de qualification. Les auteurs, forts de leurs expériences communes, ayant partagé expertises, responsabilités en entreprise et engagements dans l’enseignement supérieur de management, nous livrent leur réflexion. Ils connaissent le sujet pour l’avoir pratiqué et enseigné. Un fil rouge. A partir d’un cas concret, la question est posée à un DRH d’une filiale française rachetée par un groupe américain. Dans le cadre d’une transformation d’entreprise, que faire et quelles sont les priorités ? Autour de cette réflexion se greffent analyses, recommandations et exemples pour permettre au lecteur de saisir les implications d’une évolution du rôle du DRH. Au risque de se perdre. Fréquemment les hommes de RH répugnent à aborder les questions faisant référence à des questions jugées triviales : budget, performance, commerce, ventes, produits, stratégie. Ils se vivent plus comme les gardiens du temple, de la culture, des accords d’entreprise, des bonnes relations sociales, de la protection de l’emploi, du développement des qualifications, de la formation, de la bonne administration du personnel, de la paie…La stratégie n’est pas leur domaine de prédilection et pourquoi le serait elle ? A trop la pratiquer ils craignent de perdre leur spécificité et leur culture RH. Certes toutes les décisions RH ne relèvent pas de la stratégie. Mais à ne pas maîtriser ce glossaire, ils prennent le risque de na pas être compris dans leurs propositions RH. Le bon commerçant sait qu’il faut parler la langue de son client, et ce n’est pas perdre son identité française que de bien parler aussi l’anglais. Le DRH se doit de parler aussi la « langue » de l’entreprise, de la performance, du discours concurrentiel. Se priver de cette lecture stratégique, c’est aussi se priver d’agir avec pertinence, s’interdire d’anticiper, de guider l’entreprise dans ses choix et ses plans. Combien de projets ne peuvent se réaliser parce que l’on n’a pas pris garde à l’acquisition ou au développement des talents ? Il suffit de voir l’engouement actuel pour les programmes de leadership pour comprendre à quel point ces ressources sont rares, et saisir l’importance de l’anticipation. Pertinence et cohérence, « first things first” Certes tout ne doit pas être traité sur le même mode, et le modèle de DRH Stratège ne s’applique pas de façon universelle et systématique. Il s’agit d’une approche par strate et cumulative. Avant d’aller au plus exigeant il faut s’assurer que les conditions nécessaires requises soient présentes. Bonne administration, contrat de travail en bonne tenue, recrutement, paie, respect des basiques sociaux et légaux, formation professionnelle, autrement dit une gestion du personnel de qualité. Ceci est du registre mécanique et fonctionnel, encore faut –il que cela soit correctement fait. Vient ensuite la dimension organique. Que la fonction RH infuse et diffuse dans l’entreprise. Entretiens d’évaluation faits de façon non bureaucratique, culture managériale explicite et partagée, effort de développement des collaborateur.. ce que l’on trouve en général sous la rubrique « tous RH » qui stigmatise le fait que la mission RH est prise en charge par l’ensemble du management. Le DRH relaie, parfois impulse, les bonnes pratiques managériales, les règles d’éthique, la gestion des carrières, les démarches de compétence, les rémunérations variables, les programmes de développement du management, les réflexions sur l’organisation. Retour à la case départ Ceci n’empêche pas qu’à certains moments l’entreprise traverse de fortes zones de turbulences, sinon des ruptures, qui bien souvent font voler en éclat toutes ces bonnes pratiques. Le DRH redevient le coupeur de têtes, par nécessité, et sa crédibilité présente et future s’en ressent fortement. Une dure réalité vient contrecarrer les louables bonnes intentions. On passe du management à l’aménagement, parfois sans ménagement. Le principe de réalité guide les chefs d’entreprise, il faut réagir. Gouverner c’est prévoir Les auteurs essayent de fournir aux DRH des grilles de lecture pour leur permettre de mieux comprendre la dimension stratégique de leur entreprise, et de leur mission dans l’entreprise. Pour participer légitimement aux Comités de Direction, il faut être qualifié. Si le DRH n’offre qu’une litanie de contraintes, il sera vite marginalisé. Etre partenaire, c’est partager, participer, être partie prenante de la décision. Comprendre l’environnement, anticiper les évolutions et changements, s’approprier les transformations à venir, identifier l’impact, faire le diagnostic des compétences clefs indispensables, les recruter ou les développer, requalifier les compétences redondantes, apporter sa critique positive aux plans stratégiques, connaître les principaux clients et leurs évolutions, la concurrence…faire des études comparatives sur les meilleures pratiques, sont autant de démarches que doivent s’approprier les DRH pour prendre cette dimension stratégique. Ce faisant ils ne feront guère plus que les Directeurs d’autres fonctions, membres du Comité de Direction, qui ne peuvent plus être, uniquement, des opérationnels ou des fonctionnels experts de leur territoire ou de leur fonction. Ceci est d’autant plus important que les horizons stratégiques se sont considérablement raccourcis et que la visibilité ne dépasse guère quelques mois. Finis les plans à dix ans ! Adieu la stabilité de la vision! Les grands chantiers de la fonction RH : 5C pour ne rien oublier Cet effort de qualification doit permettre au RH de s’approprier la vision et la stratégie de l’entreprise pour la faire partager. Le déploiement est au cœur des grandes problématiques d’entreprise et à l’heure où les entreprises doivent être réactives, il importe d’être agile et rapide dans cette étape. Pour s’assurer de l’atteinte de la performance et anticiper sur le futur de l’entreprise il faut aussi manager le changement et les restructurations. Ce sont souvent des missions qui sont confiés aux Universités d’Entreprise. Mais tout ceci ne signifiera pas grand-chose si la gouvernance de l’entreprise ne présente ni transparence ni cohérence avec son projet. Le rôle pour le DRH n’est pas aisé, car outre son pouvoir d’influence, il lui faudra parfois du courage, au risque d’être politiquement incorrect, pour faire passer certains messages et défendre l’intégrité de l’entreprise. Il lui restera à communiquer en interne et en externe en appliquant les bonnes vieilles recettes du marketing, connaître les différents segments de population concernés et leur adresser des messages spécifiques. Pour toutes ces missions des rôles RH se sont différenciés : outre les fonctions classiques : sociales et relations syndicales, administratives et juridiques, recrutement, on trouve maintenant la gestion des carrière, la gestion des mobilités, des expatriation/impatriation, la gestion des talents, avec les « people reviews », les évaluations des performances et autres assessments, le développement du management et de l’organisation, les « compensations and benefits » avec les stocks options, la gestion des compétences, voire le management des connaissances ou des bonnes pratiques. Le plus dur pour le DRH étant d’assurer la coopération de toutes ces entités et leur fonctionnement en cohérence et complémentarité et non en silos. En résumé le RH stratège couvrira les 5C : Compétences, Carrières, Compensation, Coopération et Communication. Quel profil de DRH Stratège : tous les chemins mènent aux « Ressources Humaines » ! Comme pour nombre de responsabilités aujourd’hui la réponse est la même. C’est un homme aux talents et expertises multiples. Il peut venir de la fonction RH et se qualifier dans des postes opérationnels, voire à l’international, pour reprendre ensuite une position DRH, soit c’est un opérationnel expérimenté qui ayant goût et envie pour des missions RH accepte de servir de tels enjeux pour revenir ensuite à d’autres fonctions. C’est ainsi que progressivement, et en fonction , du secteur, de l’entreprise, des différents métiers et des populations concernées, le DRH passera progressivement d’une gestion administrative, à un système de type mécanique, puis organique pour devenir un management véritablement stratégique. Bruno Dufour